La géographie des Temps modernes fournit durant quatre siècles des visions du monde extrêmement contrastées : utopies, légendes, chimères, prodiges et hypothèses se mêlent à une scientificité qui s’affine : mesure précise du méridien, pesanteur et déclinaison magnétique, quantification, introduction des statistiques, recherche de principes universels.
Les chocs culturels sont considérables. On continue à chercher avec le plus grand sérieux où sont localisés le Paradis, le sixième continent antipodal, l’Eldorado ou les îles Fortunées, mais en même temps on quadrille méthodiquement la planète, on la contrôle systématiquement par le filet serré des latitudes et des longitudes, on la démystifie à coups de cartes savantes et de statistiques austères. De même, tandis que certains assimilent encore la Terre à un être vivant capricieux ou la voient comme le centre unique et glorieux du cosmos, d’autres démontrent qu’elle n’est qu’un minuscule et banal grain de sable dans l’univers désormais infini de la pluralité des mondes.
De l’imaginaire dans les représentations géographiques aux assimilations de la nouvelle immensité en passant par la conscience de la finitude du monde, les géographes dessinent peu à peu les nouveaux systèmes de compréhension du monde.